Les grands systèmes dogmatiques sont des œuvres qui témoignent du génie de l’Homme. On peut citer, entre autres, la Somme de saint Thomas d’Aquin (1225-1274) ou, plus près de nous, la Dogmatique de Karl Barth (1886-1968). Il faut savoir qu’ils sont, pour la plupart, fortement marqués par les nombreuses confessions de foi qui les ont précédés ; celles-ci étant, à l’origine, les reflets d’époques révolues. De plus, ils ont été adaptés aux besoins des dogmatiques ecclésiastiques. Ces dernières ont servi et servent encore de références pour apprécier, juger, voire condamner quiconque remettrait en question la vérité de leurs propositions. D’autant plus qu’elles sont, pour le besoin de la cause, riches en citations des Écritures avec une exégèse parfois plus ou moins douteuse. En outre, et c’est sans doute le plus grave, ces systèmes dogmatiques ont ouvert un abîme entre le savoir ecclésiastique et la prédication. Le pasteur Charles Wagner (1852-1918) en dénonçait le « formalisme », la « sécheresse rationaliste », lesquels étouffent la piété, voire engendrent le doute, enlèvent toute certitude, chargent les consciences… alors que l’Évangile est un message de vie, de libération. Il ne s’agit pas, on l’aura compris, d’interdire à l’Homme l’usage de sa raison : un don de Dieu.
Il s’agit de mettre en garde contre une dérive, une déviation mortifère qui consiste à s’enfermer dans un système en oubliant le Modèle. Une dogmatique n’est qu’une construction parmi d’autres. Qui n’a pas joué au meccano, dans son enfance et même plus tard ? Quels rapports entre les dogmatiques présentes, passées et à venir et le Modèle qui les inspire ? Quel rapport avec ce Dieu qui, du Deutéronome à l’Apocalypse, déclare : « Je suis le Vivant. » ?
Camille Izard
Mafia et calvinisme
À
la Mostra de Venise, festival international du film,
qui
avait lieu début septembre, a été présentée la série
télévisée tirée du livre ZeroZeroZero (qui
est diffusée actuelle- ment sur Canal+) de
l’écrivain italien Roberto Saviano. La fiction met en scène le
trafic international de cocaïne et ses retombées politiques et
économiques en suivant des cartels mexicains, la mafia italienne de
la région de Calabre, la ‘Ndrangheta, ou encore des hommes
d’affaires corrompus.
Roberto Saviano, « l’homme qui ne sait pas se taire »
et vit sous protection policière depuis son livre Gomorra décrivant
l’emprise mafieuse sur l’Italie était invité à Venise à
l’occasion de la présentation de cette série télévisée. Et il
a dit lors de la discussion :
« Les
mafieux sont la dernière classe dirigeante prête au sacrifice. Ils
ne s’intéressent pas à l’argent mais au pouvoir et pour cela
sont prêts à subir la haine, la solitude, la prison. Et pour cela
ils ont souvent une religiosité quasi mystique : les mafieux
sont les derniers calvinistes du monde.
Peter Ciaccio, le
pasteur méthodiste de Palerme, en Sicile, lui a répondu par une
lettre ouverte dont l’hebdomadaire protestant italien
Riforma.it a publié un extrait :
« Le
calvinisme est la première confession chrétienne qui se vit comme
minorité : les huguenots en France, les vaudois en Italie
savent qu’ils ne peuvent aspirer à commander et à devenir
religion d’État. Pourtant, dans le rapport Église/société, les
calvinistes ne trichent pas avec la loi, mais recherchent le bien de
la cité. C’est en tout cas la théorie. Dans ce but, par exemple,
les vaudois d’Italie défendent la laïcité, utilisent le 8 pour
1000 [de l’impôt sur le revenu qui en Italie peut être
explicitement attribué par le contribuable à une Eglise ou à une
œuvre] pour des projets humanitaires sociaux, culturels et non pour
le salaire des pasteurs ou l’organisation des Églises… Comparer
l’attitude égoïste, violente, idolâtre, méchante, d’un boss
mafieux au calvinisme, n’est pas une petite erreur, un détail sans
importante, une simple imprécision mais une énorme sottise. »
Dimanche 22 mars 2020 – Un culte à distance
Il est 10h15. Pierre et moi sommes dans le salon, l’ordinateur branché sur le site radio ALLIANCE+. Comme notre pasteur nous l’a indiqué dans son mail du 19 mars, un culte doit être diffusé à 10h.30 depuis Nîmes. Nous ne trouvons aucune référence à ce culte sur la grille des programmes. Pierre « trafique » sur son ordinateur. Rien. Il ne reste plus qu’à attendre. Et puis, oh miracle, à 10h30 précise, une voix, à la fois proche et lointaine, se fait entendre : c’est Rédouane (je mettrai du temps à le reconnaître) qui va donner le culte. L’entrée musicale nous surprend : le cantique « Les anges dans nos campagnes » joué à la trompette retentit. Un cantique de Noël le 22 mars ? Le culte suit son plan liturgique habituel. S’il n’est pas difficile de suivre la prédication à distance, il est nettement plus difficile de se plonger dans la prière. Des questions me viennent à l’esprit pendant les chants et musiques variés, propices au recueillement : « Sommes-nous en direct ? Non, sûrement pas ». « Combien de personnes suivent ce culte ? » Qui, dans notre communauté de St-Gall, aura réussi à se connecter ? ». Suis-je en train de rêver ? Qui aurait pu penser que nous pourrions un jour nous retrouver dans une telle situation ?
Et puis vient la prière du Notre Père. Et là, dans cette prière connue de tous, je me sens profondément rattachée à toute la communauté des chrétiens. Bénédiction. Un gospel vient clore le culte. Déjà ?
Rendez-vous est pris pour les 29 mars, 5 avril et 12 avril à 10h 30 et pour le Vendredi-Saint à 10h sur http://radioallianceplus.fr. Merci Rédouane.
Josiane FRIES
Rédaction : R. Es-Sbanti, Josiane Fries, Urs Lanz
Mise en page : M. Rüthemann
Impression : Hohl Druck AG, St. Gallen